Y a du travail .... En tout cas, c'est une très bonne idée de monter une « veille francophone » des pratiques des dirigeants français d'organismes internationaux.

AK
 

Raffarin « francophone intransigeant »

 

De passage à New York, Jean-Pierre Raffarin, récemment nommé « sherpa personnel » de Nicolas Sarkozy pour la francophonie, a peiné à convaincre les vieux briscards de l'ONU de la nécessité d'imposer une nouvelle « intransigeance francophone » en vue de lutter contre le recul de langue de Racine dans les instances internationales. Certes, l'ancien Premier ministre a beau jeu de rappeler que le français reste une des deux langues de travail du Secrétariat des Nations unies. Et que cela n'est pas « très visible dans l'exercice quotidien des responsabilités ». Mais malgré la promesse qu'il a arrachée au secrétaire général, Ban Ki-moon, de faire « plusieurs interventions stratégiques en français », les habitués de la Maison de verre restent sceptiques sur l'opportunité d'une « veille francophone » destinée à « noter » les dirigeants français d'organismes internationaux.

« Méfions-nous lorsqu'on nous explique que la globalisation oblige à globaliser les langues ! » a lancé l'émissaire de Nicolas Sarkozy en indiquant son intention de « prendre sur le vif » les dirigeants français d'organismes financiers internationaux, à Washington ou à Francfort, qui oublieraient un peu trop souvent leur langue maternelle. « Ce qu'avait fait Chirac avec Seillière reste possible », a même ajouté Jean-Pierre Raffarin en rappelant le coup d'éclat de l'ancien président français qui avait boycotté l'intervention en anglais du patron du Medef au sommet de l'Union européenne en mars 2006. Il a également indiqué son intention de renforcer la mobilisation des pays francophones pour la reconstruction d'Haïti où « le français et le créole ont sauvé des vies », en déplorant que l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) n'ait pas été invitée en tant que telle à la réunion de Montréal sur la reconstruction.

Beau joueur, il s'est bien gardé de viser particulièrement les interventions en anglais de DSK au FMI, en jugeant, au passage, « plutôt positif » qu'un homme politique français bénéficie, « pour une fois », de son passage dans une institution internationale. Mais il a eu de la peine à convaincre les journalistes accrédités à l'ONU, habitués aux longues tirades de Bernard Kouchner dans la langue de Shakespeare, de l'efficacité d'une « certaine intransigeance francophone ». Dans une autre réunion publique à New York, Jean-Pierre Raffarin n'a-t-il pas constaté lui-même en franglais l'abandon, de facto, en France de la pratique traditionnelle du « Premier ministre Airbag »… ?

 

PIERRE DE GASQUET (À NEW YORK), Les Échos

 

 

Source : lesechos.fr, le 9 février 2010

Possibilité de faire un commentaire sur le site, après inscription :

http://www.lesechos.fr/journal20100209/lec1_derniere/020354894546.htm

 

 


*******************************

 

 

Francophonie en blog, 22 janvier 2010 :

 

Raffarin a dû reconnaître que « la situation du français n’est pas satisfaisante dans l’Union d’aujourd’hui. Nous voulons clairement qu’elle ait son identité partiellement francophone ». « Il y a un travail énorme à faire. L’Europe a engrangé son potentiel francophone dès le début et cela s’est dilué depuis ». Il s’est montré très inquiet de la composition du nouveau service des porte-paroles de la Commission où l’on ne compte pour l’instant qu’une Française et une franco-britannique. Résultat : sur la situation à Haïti, pays de la francophonie, la Commission et la chef de la diplomatie européenne se sont contentées de publier des communiqués en anglais. La version française sera disponible « lundi ou mardi ».

 

http://francophonieenblog.20minutes-blogs.fr/archive/2010/01/22/raffarin-dans-l-antre-de-la-bete-anglophone.html

 

 

 

*******************************

 

 

 

Raffarin dans l'antre de la bête anglophone


Nicolas Sarkozy a nommé un preux chevalier pour venir au secours de la belle francophonie que l’ogre anglophone menace de dévorer toute crue. Paré, depuis octobre dernier, du titre de « représentant personnel du Président de la République pour la francophonie », l’ancien premier ministre, actuel sénateur UMP et membre du conseil permanent de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), Jean-Pierre Raffarin, n’écoutant que son courage, s’est rendu dans la tanière de la bête, à Bruxelles, jeudi dernier, prêt à assumer tous les risques : « quand on défend la francophonie, c’est prendre le risque de la ringardisation », a-t-il soupiré. Il est reparti, dépité, sans assurance que la belle ne serait pas dévorée jusqu’au dernier escarpin, accompagné d’un jeune journaliste d’Europe 1 que la situation politique française intéressait beaucoup plus que la situation de la francophonie.

C’est en août dernier que Nicolas Sarkozy, lors de la conférence des ambassadeurs, a annoncé qu’il allait « upgrader » (rehausser) le poste de « représentant personnel pour la francophonie » en le confiant à un politique de haut rang. Une belle intention qui ne l’a pas empêché d’approuver la nomination de Catherine Ashton à la tête de la diplomatie européenne, le 19 novembre dernier, alors qu’elle est monolingue anglophone… L’Élysée ne semble pas avoir compris que les femmes et les hommes sont la clef du multilinguisme. Car, si le chef ne parle pas français, tous les projets sont rédigés en anglais, une langue qui véhicule d’autres valeurs que celles de la francophonie, comme l’a rappelé Raffarin : « il s’agit d’un combat pour les valeurs, pas contre l’anglais ». Il recevra d’ailleurs cette semaine à Paris la ministre européenne des affaires étrangères afin de s’assurer qu’une présence francophone dans son cabinet est bien prévue.

Le problème, il faut bien l’admettre, est que les francophones eux-mêmes ne sont pas les meilleurs défenseurs du français. Ainsi, le Représentant personnel de Sarkozy a rencontré les trois présidents lors de son bref séjour bruxellois : le Belge Herman Van Rompuy, le président du Conseil européen, le Portugais José Manuel Durao Barroso, le président de la Commission, et le Polonais Jerzy Buzek, le président du Parlement. Or, les deux premiers, bien que parfaitement francophone, le troisième ne parlant pas un mot de français, s’expriment désormais presque uniquement en anglais en public. Raffarin a raconté que Barroso lui a expliqué que lorsqu’il pratiquait la langue de Molière devant la presse, « cela créait des remous dans la salle ». « Je lui ai rétorqué que le fait qu’il parle anglais provoquait d’autres remous et qu’il n’y avait pas les bons remous et les mauvais remous »…

Raffarin a dû reconnaître que « la situation du français n’est pas satisfaisante dans l’Union d’aujourd’hui. Nous voulons clairement qu’elle ait son identité partiellement francophone ». « Il y a un travail énorme à faire. L’Europe a engrangé son potentiel francophone dès le début et cela s’est dilué depuis ». Il s’est montré très inquiet de la composition du nouveau service des porte-paroles de la Commission où l’on ne compte pour l’instant qu’une Française et une franco-britannique. Résultat : sur la situation à Haïti, pays de la francophonie, la Commission et la chef de la diplomatie européenne se sont contentées de publier des communiqués en anglais. La version française sera disponible « lundi ou mardi ». Sans compter les chefs de cabinet des nouveaux commissaires, où les anglophones de naissance se taillent la part du lion. « Au Parlement européen, on me dit que tout faire en anglais, c’est plus facile, car ça coûte moins cher. À la Commission, on me dit que tout faire en anglais, c’est plus facile, car c’est plus rapide », s’est-il indigné.

Face à la mauvaise volonté des institutions européennes, « il va falloir accepter de passer par des gestes de caractère, pas de mauvais caractère ». Et de rappeler la « jurisprudence Chirac-Sellière », une référence à l’incident qui a opposé l’ancien Président de la République à l’ancien patron des patrons européens, un Français qui a rebaptisé l’UNICE, « Business Europe » : lorsque ce dernier a pris la parole en anglais, Chirac est sorti de la salle. « Il ne s’agit pas que tout le monde parle français, mais de s’assurer qu’il y a une présence forte du français » : « il faut organiser cette exigence francophone ».

Je lui ai suggéré de créer un « tableau de bord » du multilinguisme : pointer régulièrement le nombre de textes uniquement disponibles en anglais, les sites européens uniquement anglophones, les porte-paroles incapables de s’exprimer dans une autre langue étrangère que l’anglais, etc. Il m’a promis d’examiner l’idée.

Maria Niculescu, la représentante permanente auprès de l’Union européenne de l’OIF, a estimé que tout n’était pas perdu, lors de la conférence de presse de Raffarin : « auparavant, il fallait démarcher les Représentations permanentes pour leur proposer des cours de français. Depuis deux ans, c’est l’inverse, les nouveaux pays membres ayant compris que parler français était une nécessité à Bruxelles ». Elle a notamment salué la mobilisation de la Pologne et de Chypre, de plus en plus sensibles à cette problématique du multilinguisme.

 

 

Source : bruxelles.blog.liberation.fr, le 18 janvier 2010

Possibilité de réagir sur :

http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2010/01/raffarin-dans-lantre-de-la-b%C3%AAte-anglophone.html

 

 

 

Haut de page