La communauté germanophone : un ovni

 

À la rentrée parlementaire, les médias ont divulgué les tractations en coulisse de certains politiciens sociaux-libéraux concernant les prochaines élections européennes (Juin 2004) ; la Belgique devant renoncer à un parlementaire européen (24 au lieu de 25 à cause de l’élargissement de l’UE), les deux grandes communautés belges tiraient leur épingle du jeu au détriment de la plus petite et plus faible communauté du pays.
Ce marché de dupes a une nouvelle fois montré au parti des germanophones de Belgique (PDB) que la communauté germanophone (CG) est davantage considérée dans le paysage fédéral comme une entité subordonnée que comme un véritable partenaire. Comment expliquer autrement la position des Flamands qui refusaient toute concession et renvoyaient la balle aux Wallons afin de «régler cette question entre eux» ?
Aujourd’hui après moult tergiversations, le camp violet en CG dément toute cabale et Ferdel Schröder (MR) clame énergiquement l’innocence de son parti : il n’y a pas eu de concertation à ce sujet avec sa hiérarchie. Louis Michel confirme, Antoine Duquesne infirme dans une interview accordée au BRF... Voilà encore une belle démonstration de la virtuosité politique de certains représentants. Mais tout est bien qui finit bien les germanophones de Belgique conservent leur parlementaire européen. Il faut néanmoins tirer les leçons de ce regrettable incident et s’interroger sur la réaction de certains Wallons qui préféraient mettre sur la sellette le seul député européen germanophone de Belgique.

 

La communauté germanophone? 

Une entité subordonnée plutôt qu’un véritable partenaire...

 

En guise de réponse, le ministre Écolo de la Communauté germanophone, Hans Niessen, affirme lapidairement que le groupe parlementaire PJU­PDB (Partei der Deuschsprachi­gen Belgier - Juropa - Unabhängige) a toujours eu une dent contre la Wallonie et n’a jamais laissé passer une occasion de raviver ce ressentiment. Le ministre Niessen se garde toutefois de répondre clairement à notre question.
Certes, toute personne qui suit avec un minimum d’intérêt la politique en communauté germanophone n’ignore pas que le PJU-PDB n’a absolument rien contre la Wallonie. Conformément à nos principes, notre responsabilité politique consiste à défendre démocratiquement les droits d’une minorité reconnue constitutionnellement par l’État fédéral belge.
Notre champ d’action se situe au niveau politique, où nous constatons un traitement de défaveur de la part de nos partenaires wallons.
Mais ce qui nous préoccupe davantage, ce sont les raisons qui poussent les politiciens wallons à avoir une attitude fermée, caractérisée par l’ignorance et l’incompréhension. Pourquoi une majorité de la population belge ne connaît-elle pas la CG ?

 

Nous organiserons prochainement une offensive de charme destinée 

à nos amis wallons et flamands.

 

Pourquoi persiste-t-il dans la tête des gens connaissant la CG la fausse image d’une communauté gâtée ("cul dans le beurre"), éternellement revendicatrice et exigeante ("toujours de­mander plus") dont l’aspiration première consiste à un retour à l’Allemagne (cf. le reportage du "Bus des Régions" sur la RTBF après l’affaire Van Cauwenberghe l’été dernier) ?
Nous pensons qu’il est temps de réagir. Pour ce faire, nous organiserons prochainement une "offensive de charme" destinée à nos amis wallons et flamands. Le principal objectif de cette démarche consiste à faire table rase des préjugés pour laisser transparaître la réalité une communauté de 71000 habitants qui, à l’instar de ses voisins, souhaite cultiver ses particularités et aspire à un traitement constitutionnel équitable au même titre - et sous les mêmes conditions - que les autres entités fédérées du pays.
Pour son trentième anniversaire en 2003, il ne nous reste qu a lui souhaiter un franc succès dans la réalisation de ses ambitions, une grande assiduité dans le renforcement et la défense de son identité, ainsi que beaucoup de persévérance dans sa quête de reconnaissance et d’autodétermination. 

 

 

Dorothea Schwall-Peters

Parlementaire du groupe du Parti des Belges de langue allemande (PJU-PDB)

 

 

Source : Le Soir, journal du 10 décembre  2003