Le rêve rattachiste de Gendebien entre au  Sénat ... français.

 

Politique : Le Rassemblement Wallonie-France veut sensibiliser les élites hexagonales à son projet.

le geste est symboliquement fort : pour la première fois depuis qu'il a lancé son combat pour la réunification de la Wallonie et de la France (avec Bruxelles, si elle le souhaite), Paul-Henry Gendebien est allé exposer sa vision dans un haut lieu de la République. Au Sénat français ! Certes, l'invitation émanait du frais émoulu Cercle franco-wallon et non du président Poncelet. Et la conférence eut pour cadre une salle de conférences des jardins du Luxembourg et pas l'hémicycle.

Reste qu'un pas a été franchi : le monde politique hexagonal ne pourra plus ignorer qu'un peu plus au nord, un mouvement politique rêve de revenir à la situation d'avant 1814, lorsque la Belgique était française. À la nuance près que cette fois, ce serait sans la Flandre...

Le Cercle franco-wallon n'a que quelques mois. Son objectif ? Préparer ce grand dessein dans les esprits en montrant aux Parisiens que leurs voisins wallons sont plus que des cousins, plutôt même des frères, comme l'a souligné Jean Charbonnel, ancien ministre de De Gaulle. Et ce sur tous les terrains : une prochaine conférence aura pour thème la place de la femme dans l'œuvre de Simenon... Un sujet plus léger que le diagnostic posé par Gendebien, lundi soir. Dans une annexe du Sénat que l'on atteint, dûment badgé, après un parcours (fléché) du combattant et la traversée d'une salle où se retrouvent toutes les Marianne de la République, des origines à celle aux formes aguichantes d'Aslan, près de 200 personnes ont répondu à l'invitation. Beaucoup d'anciens ambassadeurs impliqués dans le combat de la francité, mais aussi un sénateur des Ardennes, des diplomates retraités du Québec et du Sénégal. Et des Wallons de Paris. Parmi les absents excusés, le président du Parlement wallon, Robert Collignon, et le président de l'Agence de coopération francophone, Roger Dehaybe, mais aussi, ô surprise, Anne-Marie Lizin.

Introduisant l'orateur, l'ancien ministre Charbonnel et le sénateur chevènementiste Jean-Yves Autexier précisent qu'il ne s'agit pas de s'ingérer dans la vie politique belge, mais on ne peut rester indifférents...

Gendebien tranche d'emblée dans le vif en parlant de la Belgique, cet homme malade de l'Europe dont les deux grandes communautés ne cessent de se séparer.
À l'instar de François Penn, Gendebien parle de nation impossible, d'État improbable. Création de la diplomatie, la Belgique dominée à sa création par la bourgeoisie francophone est aujourd'hui sous la coupe flamande.

Exemples à l'appui, le président du Rassemblement Wallonie-France s'est efforcé de démontrer que le pays était dans un engrenage fatal, les révisions successives de la Constitution ne faisant que précipiter su décomposition. Et de pointer l'index vers une Flandre de plus en plus tentée par un séparatisme de pays riche qui fait fi de la solidarité sociale, mais qui veut aller plus loin en régionalisant le rail, l'aéroport national, etc.

Pour Gendebien, les francophones ne prennent pas suffisamment les menaces flamandes au sérieux. Résultat : la Wallonie va se retrouver à genoux. Il faut prendre les devants et envisager sereinement la scission. C'est la réunification avec la France qui a sa préférence. Non sans arguments : en faisant de la Wallonie la 23e région française (avec 6 départements dont deux pour le Hanaut) et de Bruxelles, su 24e région, la France pourrait contrebalancer l'invasion anglo-américaine à Bruxelles et faire contrepoids à l'Allemagne réunifiée. Et cela permettrait de sortir la Francophonie de sa torpeur bureaucratique.

Gendebien ne doute pas du sens de l'Histoire : le sujet n'est plus tabou, ni dans les bistrots ni dans les salons. Et rien ne pourra aller à son encontre.
Même pas la monarchie ? - Non, car les élites flamandes n'ont que faire d'une monarchie désacralisée et populiste dont les moindres gestes sont relayés par la propagande médiatique...

Le président du RWF est optimiste : les élections régionale de 2004 pourraient précipiter la fin de la Belgique....

Christian Laporte

 

Source : Le Soir, journal du mercredi 19 février 2003