FAIT DIVERS PRÈS D'UNE ÉCOLE FLAMANDE...
Agressée car elle parlait français ?
 

Le Sint-Godelieve-lnstituut de Kapelle-op-den-Bos, l'école où est scolarisée l'adolescente qui dit avoir été agressée parce qu'elle avait parlé français avec une amie dans la rue, n'a pas souhaité réagir directement à l'incident. Dans un communiqué, la direction souligne que l'incident s'est produit hors de l'école en dehors des heures de classes et que le déroulement des faits n'est pas encore clair. La direction dit en tout cas déplorer l'incident. Sara, 14 ans, parfaite bilingue, a été tailladée de coups de cutter.


PARQUET PAS AU COURANT

Elle a expliqué que c'est parce qu'elle parlait français avec une amie dans la rue. Elle a dit, qu'une des élèves de son école l'ayant entendu parler en français, lui a fait signe de s'approcher. Rapidement entourée, Sara a alors sorti le cutter qu'elle avait sur elle. Le cutter est finalement tombé aux mains des autres élèves, a-t-elle expliqué.

Le parquet de Bruxelles a indiqué vendredi qu'il n'était pas au courant de l'incident. La police locale de Kapelle-op-den-Bos a de son côté préféré ne pas faire de commentaires. La direction de l'école dit qu'elle attend les résultats de l'enquête. « La direction du Sint­Godelieve-Instituut a été mise au courant de l'incident impliquant des élèves de l'école » explique, dans un communiqué diffusé vendredi, Daniël Verelst, le directeur de l'école. « La direction déplore les faits. L'affaire sera suivie avec le Centre d'accompagnement des élèves. Vu les déclarations contradictoires sur le déroulement exact des faits, la direction attend les résultats de l'enquête menée par la police locale avant de se prononcer », poursuit le directeur.

La direction appelle toutes les personnes impliquées dans l'incident d'éviter de faire des déclarations avant qu'il soit éclairci. Le Centre d'accompagnement des élèves, qui dépend du ministère flamand de l'Éducation, est l'équivalent du PMS.

 

Source : La Capitale, le 18 octobre 2008

 

Sara dit avoir été agressée par des jeunes qui lui reprochaient de parler français dans la rue. Ce serait alors probablement la première fois qu'une querelle communautaire prend une tournure aussi grave. (Photo Demoulin)


« J'ai parlé français dans la rue »
 

À Kapelle-op-den-Bos, cela n'a pas plu. Sara, 14 ans, a été tailladée de 38 coups de cutter !

KAPELLE-OP-DEN-BOS. Il y a quelques années, Wendy a décidé de s'installer à Kapelle-op-den-bos, une commune flamande située à 10 km de Bruxelles. « Je suis francophone, mais je me débrouille en flamand et d'ailleurs, je travaille pour une société flamande. Je me suis installée ici, car je voulais de la sécurité pour mes enfants et à Bruxelles, ce n'était pas possible. Finalement, c'est ici que ma fille a été agressée ».

Trente-huit coups de cutter sur les avant-bras, car Sara, 14 ans, a parlé français dans la rue !

Sara est parfaite bilingue, comme beaucoup de ses amies. « Elle va à l'école en flamand. C'est à quelques minutes de chez nous. À la maison,  c'est vrai que nous parlons le français, dans la rue aussi, parfois. Et c'est cela qui a dérangé des jeunes de son école ».

Une des étudiantes a fait une remarque à Sara qui parlait français avec une amie sur le trottoir près de l 'école. « Elle ne supporte pas que je parle à mes amies en français ».

Vendredi, les remarques ont pris un tournant on ne peut plus inquiétant. «aElle m'a fait signe de venir vers elle ». Sara lui a demandé, en flamand, s'il y avait un problème. « Elle a pris son GSM et a envoyé un SMS. Quelques secondes plus tard, ses amis sont arrivés vers moi ».

Sara s'est retrouvée entourée. « Je me suis vraiment sentie menacée. J'ai voulu partir, mais ils ne m'ont pas laissé faire », explique l'adolescente de 14 ans. « J'avais eu cours de dessin, j'avais donc un cutter avec moi. C'est idiot, je sais, mais j'ai eu le réflexe de le sortir. Ils étaient loin de moi et la lame n'était pas sortie ». La jeune fille qui l'avait abordée lui a dit que ce n'était pas très malin. « C'était vrai. Je l'ai lâché, il est tombé à terre ». Sara a cru que l'incident était clos. « Mais ils étaient toujours plus nombreux, car tout le monde venait voir ce qui se passait ».

Quelqu'un a ramassé le cutter. « Ils m'ont tenue. J'ai voulu me débattre. Je sentais que ça brûlait à mes bras. Je pleurais ». Et puis, Sara a vu le sang. « Je me suis enfuie et je suis allée à la maison. Ils riaient tous. Il y a même des gens qui ont applaudi ».

En voyant les blessures, Wendy, la maman de Sara (qui est sous calmants depuis), n'en a pas cru ses yeux. « Je suis allée à l'école. La police est venue. J'ai déposé plainte ». Et là, c'est l'incompréhension. « C'est ma fille qui est renvoyée pour agression ! Le directeur est convaincu que ma fille s'est tailladée elle-même ! » Wendy s'est rendue avec sa fille, hier après midi, à l'école. « Pour l'instant, elle ne peut pas retourner à l'école, le directeur m'a dit qu'il ne pouvait pas garantir sa sécurité ». Wendy est désemparée. « Je ne sais plus quoi faire ni à qui m'adresser. Je cherche un avocat qui pourra m'aider ... »
En se renseignant, Wendy a appris que la discrimination de langue n'existait pas. « Et je fais quoi maintenant, moi ? Et ma fille, que va-t-elle devenirA?A»


Emmanuelle Prael

 

Source : La Dernière Heure, le 17 octobre 2008