Monsieur le
Commissaire,
Sans doute ne lirez-vous pas ma réaction; vous êtes très occupé
et n'avez certes pas de temps à perdre avec un plébéien
européen.
Cependant je me suis senti interpellé par vos propos publiés
le 6 février sur votre "Site multilingue", principalement ceux
relatifs à l'espéranto qui, selon vous, ne serait pas apte à
devenir la lingua franca de l'Union.
Personnellement je ne m'intéresse pas à la problématique
linguistique au sein des instances européennes, où, malgré les
dénégations de façade, l'anglais est de plus en plus imposé
comme LA langue noble, la lingua franca de l'UE.
Vous déclarez, sur la base de vos informateurs, que "le
vocabulaire social ou culturel de l'espéranto n'est guère
étendu". C'est possible ! Mais, en tant que simple plébéien, je
me demande pourquoi dès alors l'espéranto est-il devenu l'une
des "langues officielles et de travail" de l'Académie
Internationale des Sciences «
www.ais-sanmarino.org
» !? Pour y discuter de simples banalités?
Comment comprendre cette position de l'International PEN à
l'égard de cette langue ?
International PEN (P= Poets,
Playrighters ; E= Essayists, Editors ; N= Novelists, Non-fiction
authors - The worldwide association of writers with 145 Centres
in 104 Countries exists to promote friendship and intellectual
cooperation among writers everywhere, to fight for freedom of
expression and represent the conscience of world literature )
«
http://www.internationalpen.org.uk/ ».
Après une enquête de cinq ans, l'International PEN a reconnu que
l'espéranto était bien une langue littéraire et, depuis, le
Centre Esperanto est repris parmi les 145 Centres de cette
organisation mondiale :
http://www.internationalpen.org.uk/index.php?pid=19.
Bref, pour le pratiquer quotidiennement depuis plus de 30 ans
avec des personnes de tous les continents, de tous les milieux
sociaux, politiques, religieux, philosophiques, je trouve, au
contraire, que cette langue est une excellente lingua
franca et un tremplin idéal vers un multilinguisme tous
azimuts. À mes yeux, c'est la seule langue qui permette le
dialogue interethnique, interculturel, dans le respect mutuel
de la langue, de la culture, de la dignité de chacun, sans
aucune forme de racisme culturo-linguistique.
Langue de l'amitié et de la tolérance, l'espéranto génère un
esprit spécifique qui est très bien exprimé par un Chinois,
professeur d'anglais, dans une déclaration à un journal
américain lors d'un séjour linguistique aux États-Unis : "When I
speak Esperanto with an American Esperantist, we meet on a
linguistically neutral basis, so we avoid the risk of butchering
the other's native language. This prevents
embarrassment and misunderstanding, and encourages a free and
friendly exchange of ideas. When two persons shake hands, each
extends his hand halfway, meeting in a neutral zone as a mutual
gesture of friendship. So it is with Esperanto - a linguistic
handshake" (Zhou Huanchang, Esperanto - A Linguistic
Handshake, Los Angeles Times", 2. Part II/
Saturday, March 10, 1984).
Vous qualifiez par ailleurs l'espéranto de « langue
artificielle ». Et je suis entièrement d'accord avec vous.
Personnellement je ne connais aucune langue - pas même le
français, ma langue maternelle que j'ai enseignée pendant 34 ans
dans une école secondaire - qui n'ait pas été créée de toutes
pièces, artificiellement, par des êtres humains selon
leurs besoins de communication. Si l'on devait rejeter tout ce
qui est artificiel, nous en serions toujours à l'âge de la
pierre - même pas de la "pierre taillée" qui est déjà
"artificielle" et donc à rejeter selon vos critères - et à nous
prélasser couverts seulement de nos poils naturels - puisque les
peaux de bête sont une couverture "artificielle" et donc à
proscrire.
Bref, nous n'aurions pas eu l'occasion de dialoguer, puisque
tout naturellement, nous en serions toujours à pousser nos cris
primitifs et à esquisser quelques mimiques tout à fait
naturelles pour exprimer nos sentiments... bestiaux.
Je vous remercie, si vous m'avez lu jusqu'ici, et vous prie
d'agréer, Monsieur le Commissaire, l'assurance de ma
considération distinguée.
Un plébéien européen
Germain PIRLOT
Enseignant hon.
Steenbakkersstraat 21
8400 Oostende