La photographie en pièce jointe représente la mention portée au dos d'une assiette de la faïencerie de Pornic (en Loire-Atlantique). On y produit de fort jolis objets peints à la main, justement renommés pour leur style breton hérité d'une tradition qui remonte au XVIIIe siècle. On remarquera que la revendication d'une appartenance au patrimoine artistique français est exprimée par un label en ... anglais : "French Heritage" ! Il n'est pourtant probablement pas un seul anglophone qui ne comprendrait pas aisément une expression telle que « patrimoine français ». On voit bien, avec cet exemple tout simple comme avec tant d'autres, que c'est bien moins pour se faire comprendre des anglophones que les entreprises commerciales recourent de plus en plus massivement aux mots anglais que pour attester de leur ouverture au monde et à la modernité, de leur rejet de l'enracinement (même lorsque, paradoxalement, on se réclame d'une tradition locale). N'est-ce pas la mode que de sacrifier ainsi à l'anglomanie et ceux qui la contestent ne sont-ils pas « un peu vieux dans leur tête », ne sont-ils pas des nostalgiques d'un conservatisme et d'un nationalisme (deux gros mots par les temps qui courent) d'un autre âge ?
En
France, en ce moment, beaucoup d'entreprises, notamment parmi les plus
grandes d'entre elles, s'attachent à faire savoir urbi et orbi, afin de
se faire valoir, qu'elles ont signé, ou qu'elles vont signer, la « Charte
de la diversité », créée le 24 octobre 2004, « pour encourager les
entreprises à refléter dans leur effectif les diverses composantes de la
société française, et à faire de la non-discrimination et de la
diversité un axe stratégique ». Rien de tel en matière linguistique. Là,
il n'est nullement question de diversité mais, au contraire,
d'uniformité au profit de l'anglais, que le monde des affaires veut
imposer petit à petit à l'ensemble de la société, tandis que la langue
française y est victime d'une disqualification et même d'une
discrimination croissantes. Comme l'a parfaitement bien vu le professeur
Bernard Lecherbonnier dans son excellent livre « Pourquoi veulent-ils
tuer le français ? » (chez Albin Michel, 2005), pour les opérateurs
économiques et financiers d'une économie mondialisée « la diversité
linguistique fait partie de ces obstacles qu'il faut éliminer ». En face
d'eux, les États sont d'autant moins disposés, et aptes, à essayer de
leur faire échec que l'idéologie marchande néolibérale les a largement
convaincus de prêter la main à leur propre dépossession au bénéfice de
la loi divine des marchés et qu'il n'est plus grand chose qui leur
répugne davantage, désormais, que le protectionnisme.
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