Sujet : Classement de Shanghaï ou l'art de s'auto-flageller
Date : 04/05/2008
De : Charles Durand  (courriel : charles.durand(chez)hotmail.fr)   Mesure anti-pourriels : Si vous voulez écrire à notre correspondant, remplacez "chez" par "@"

 

Ce classement qui place les universités françaises et européennes à la traîne

 

Dur, dur. Le nouveau classement des facs par matière (médecine, mathématiques, informatique, sciences sociales et sciences de la Terre) de l'université Jiao Tong de Shanghai se révèle une fois de plus cruel pour les facs françaises.

Dans la catégorie «sciences sociales», le top 100 ne comprend aucun établissement français. Dans le secteur de la médecine, le tableau est un peu moins noir, avec le classement de Paris-V  entre la 76e et la 107e place… ex æquo, donc, avec une trentaine de ses consœurs étrangères.
 
Un peu plus forts en maths
 

C’est dans le domaine des mathématiques et des sciences naturelles que les facs françaises s’en sortent le mieux, avec l'université Paris-XI en 25e position, suivie par Paris VI en 31e place. L'École normale supérieure (39e) et Strasbourg-I (entre la 52e et la 76e place) font également bonne figure parmi les cent premiers établissements de leur catégorie.

Mais devant la liste immense des universités américaines (Harvard et Stanford, notamment), qui caracolent en tête, le cru français paraît morose. Au total dans les « top 100 » de chaque catégorie, les facs de l’hexagone apparaissent neuf fois … contre 308 pour les américaines !

Un retard, d’ailleurs, qui n’est pas seulement français mais plus largement européen: le «vieux continent» a deux fois moins de « primés » dans le top 100 des catégories des sciences naturelles et mathématiques ou dans le secteur médical, que le continent américain. Dans le domaine de la technologie et des sciences informatiques, l’Asie devance l’Europe.

Il est vrai que les critères retenus pour le classement, basés sur « leurs performances dans le domaine académique et de la recherche » (nombre d'élèves ou d'enseignants ayant reçu des prix Nobel, importance des travaux de recherche publiés en langue anglaise, etc.) devant la prise en compte de l’insertion professionnelle ne favorisent pas les facs françaises.

Le classement n’en reste pas moins un cruel revers.

Appel au débat

Ch. L


Source : 20Minutes.fr, éditions du 27/02/2008

http://www.20minutes.fr/article/215748/France-Ce-classement-qui-place-les-universites-francaises-et-europeennes-a-la-traine.php

 

 

Réaction de Charles Durand :

Il faut comprendre que, la plupart du temps, les étudiants étrangers sont une mine d'or pour les universités qui arrivent à les attirer. Les frais d'inscription sont souvent plus élevés pour les étudiants étrangers que pour ceux qui sont basés localement. D'autre part, il est prestigieux d'avoir des étudiants étrangers qui feront ainsi de la publicité directement ou indirectement auprès de leurs concitoyens.

Dans ce marché extrêmement juteux, les universités anglo-saxonnes ont tenu le haut du pavé pendant longtemps. C'est encore le cas avec les universités australiennes, qui ratissent large en Asie du sud-est. Cependant, les universités étasuniennes n'attirent plus les étudiants étrangers autant qu'autrefois. La politique étrangère étasunienne a joué un grand rôle dans cette désaffection et il en est de même pour les universités anglaises. D'autre part, il semblerait que, dans un nombre croissant de pays, les autorités veulent rendre plus internationale l'offre universitaire étrangère en invitant des universités étrangères à installer des campus chez eux. De plus, leurs élites les plus perspicaces se rendent comptent d'un affaissement de la qualité de l'offre anglo-saxonne, particulièrement aux États-Unis et qui va de pair avec l'affaissement total de la qualité de l'enseignement secondaire, un phénomène qui a commencé dans les années 60. Bien qu'il existe encore incontestablement des centres d'excellence, une grande université ne peut pas prospérer très longtemps dans un environnement intellectuel globalement médiocre. Le déclin universitaire étasunien est bien réel et perçu clairement comme tel par ceux qui sont les mieux informés et qui ont la possibilité de faire des comparaisons par eux-mêmes, sans passer par ce fameux « classement de Changhaï ».

Pour toutes ces raisons, plusieurs pays ont encouragé chez eux la création de succursales d'universités étrangères. En ce qui concerne la France, je ne suis pas totalement dans le secret des dieux mais je sais qu'il existe déjà la Sorbonne d'Abou Dhabi, qu'un projet d'université de technologie française doit se monter au Pakistan, à la demande des Pakistanais, et qu'un projet similaire doit se réaliser à Changhaï à la demande des autorités chinoises ! La France n'est bien sûr pas le seul pays à être dans ce cas. Des pays comme la Suède, l'Italie, l'Allemagne, le Japon et la Corée du sud ont été également sollicités.

La propagande du style « classement de Changhaï » est donc clairement une arme de guerre pour miner le prestige universitaire des pays non anglophones. IL NE FAIT AUCUN DOUTE QUE CETTE INITIATIVE A ÉTÉ CRÉÉE ET FINANCÉE PAR LES ANGLO-SAXONS, à travers diverses façades et, dans le cas présent, à travers diverses organisations chinoises interposées.

Cependant, toutes les universités non anglo-saxonnes sont terriblement vulnérables à ce type de propagande pour la seule et simple raison qu'elles reconnaissent explicitement ou implicitement l'anglais comme seule langue de communication internationale pour la recherche et ce faisant, elles doivent ainsi jouer un jeu dont les règles ont été écrites par les anglo-saxons, comme je l'ai bien expliqué dans mon petit ouvrage intitulé « La mise en place des monopoles du savoir ». Tant que les critères anglo-saxons seront appliqués pour l'évaluation de la recherche, ET IL NE PEUT EN ÊTRE AUTREMENT TANT QUE L'ON RÉDIGE DES PUBLICATIONS EN ANGLAIS, il est probable que les évaluations faites par le biais de ces critères apparaîtront automatiquement défavorables aux non anglo-saxons. Là encore, se référer à « La mise en place des monopoles du savoir » où j'explique les liens de cause à effet.

Ce qui est sûr, c'est que si on arrive à faire sentir à un homme, à une organisation ou à un pays qu'il est « inférieur », il n'y a pas à se faire du souci par la suite car cet homme, cette organisation ou ce pays se placera PAR LUI-MÊME en position d'infériorité, dans une situation potentiellement concurrentielle. Le petit malin qui aura ainsi sécurisé sa position dominante continuera à bénéficier de ses privilèges. Il continuera à s'approprier les richesses du dominé en attendant, pourquoi pas, de mettre sa femme ou sa fille dans son lit. Ainsi va le monde depuis la nuit des temps...

Mais, quand on réussit ce coup là avec des soi-disant intellectuels, des soi-disant « universitaires de haut niveau » et des hauts fonctionnaires du style de ceux qui nous gouvernent et qui ne tarissent pas leur allégeance aux Étatsuniens, alors, il est peut-être temps de se demander comment ces «aélitesa» sont arrivées aux postes qu'elles occupent !

Charles Durand

 

 

Réaction d'Aleks :

Un article sur le classement de Shanghai, qui a donné l'occasion à la France et aux Français de pratiquer comme ils l'aiment un exercice d'auto-flagellation, de masochisme, d'à-plat-ventrisme :  « les universités françaises sont les plus nulles au monde, c'est normal...»

AK